Créations vol 1, nº 1, pages 12-13 |
Denise Brassard
Une joie lente infuse…
Une joie lente infuse
la nuit le bleu des âmes rassemble ses sillons
le geste fuse incise le vide
la joie trace les écarts où s’engouffrent
les sanglots que je cache à la face du monde
mille poèmes
écorchure la beauté que l’on ne sait plus dire
que l’on pleure à part soi
une joie aux espoirs
me vient du temps d’avant les émondeurs
d’avant les enchevêtrements du monde cette joie
monte
ainsi qu’un arbre s’entête à nouveau
l’odeur de la terre
neige enclose
entre mes paumes les poèmes
promesse de printemps
La chute des corps
un corps entre tous
cherche la peau qui ranime
la grandeur passe
de l’espace à l’image
un corps se rature se rassure
un corps se censure
sang sur la toile on ne le voit pas
les yeux de ceux qui croient comprendre
se ferment au gré des ombres
au seuil des mémoires à crever
pour passer du côté des couleurs
leur voix se tait
c’est un faux calme
une détresse entre les lignes il y a
des tranchées pour le monde
il est question de nous
dressons le bilan de nos visages pâles
qu’on sache qu’il reste à naître des
soleils
et cessons de mourir à l’oeil nu
notre peau cet alibi
cette mesure de l’absence craque
et nous n’y rêvons plus
des restes des restes
des moins que phrases des presque mots
des insinuations
pourpres nos ombres sur le ciel de mai
pleuvent bas, tellement bas
troués de vastes rumeurs nos corps
se cherchent constellés
forêts de mains tendues vers la lumière
nos pas aveugles
sement les débris de l’ombre
Denise Brassard
Est née à Chicoutimi, Québec, en 1963. Elle a publié
deux recueils de poésie, Zoom ou rien, Éditions Gaz
Moutarde, 1994 et l’Écueil des jours, Écrits des
forges, 1997. Elle a signé des textes dans divers
collectifs et a travaillé comme journaliste littéraire.
Elle prépare actuellement un doctorat en littérature
québécoise et codirige la revue de poésie Exit.